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Cuisines chinoises

A dormir sous les étoiles, nous contenter de peu, côtoyer les religions du monde, rencontrer des peuples différents, vous pensez peut-être que nos discussions sont philosophiques, sociales, politiques, atteignent le pinacle, tutoient la stratosphère ? Que nenni, quelle erreur ! Ce qui nourrit 80% des conversations des cyclistes en goguette, c’est la nourriture, la bouffe, la mangeaille, la boustifaille ! Nous vous comptions déjà depuis la Turquie que l’on aimait d’abord un pays par le ventre, rien n’est plus vrai. Avant de le dévorer des yeux, on le dévore avec les dents, on le mâche et remâche avec délectation et on le digère avec volupté. En quittant la platitude steppique de la graisse de mouton d’Asie centrale, l’arrivée en Chine est une explosion de saveurs, d’odeurs, de textures. De quoi alimenter les débats de cyclistes pendant des mois et nourrir leurs rêves pendant des décennies, voire pendant plusieurs cycles de réincarnation ! Au diable les Grandes Murailles, les Cités Interdites, les armées de terre cuite, le vrai monument de la Chine c’est bien sa cuisine et l’on peut raisonnablement venir en Chine que pour déguster la cuisine.

La cuisine chinoise, ou plutôt les cuisines chinoises –il y a au moins huit catégories d’écoles de cuisine- sont d’une variété extraordinaire, alimentées par une diversité de produits bien plus grande que chez nous, légumes verts, racines, champignons, algues, épices, fruits de mer, viandes… On dit ici que tout ce qui a quatre pattes se mange hormis les tables et les chaises ! Nous n’en connaissons en France qu’une infime partie, plutôt d’origine cantonaise. Une multiplicité de cuisines à l’échelle d’un pays continent grand comme l’Europe, fort d’une population 4 fois plus importante, de climats très différents et de 56 minorités ethniques reconnues. Le nord-ouest, pays du blé est aussi le pays des pâtes. Avec un petit pâton, le chef cuistot les prépare sous vos yeux, étire la pâte, la fouette, fait de savantes vrilles et recommence plusieurs fois avant de la cuire en d’interminables lanières. Le sud est le pays du riz et du thé, servis à volonté. Le plateau tibétain pays de l’orge est aussi celui de la tsampa, de la crème et de la viande de yak.

D’amples gestes pour façonner les nouilles dans le nord ouest

Ragout de yak (soupçonné d’être à l’origine des problèmes dentaires de Nicolas)

Diversité également dans les modes de cuisson, au wok le plus courant ici, en grillade, en fondue, en soupe, à la vapeur dans de délicats paniers de bambou, sur des pierres chauffées, dans des fours faits de deux étages de braises, un en dessous, un au dessus, en fûts de vinaigre… Quasiment partout, la cuisine est fraîche, préparée à l’instant à la demande de chacun, le plus souvent devant vous et en quelques minutes. Dans le moindre bouiboui, la carte est longue comme le mur mais réellement disponible et l’on vous fait des petits plats succulents. Et encore nous ne connaissons que la cuisine de tous les jours, celle que l’on vous sert pour 1 à 5 € maximum, pas la cuisine des grands restos des villes millionnaires.

Marmite de bouillon où terminent de cuire de multiples ingrédients

Cuisson de galettes dans un four. Pas bien fréquent malheureusement !

La cuisine chinoise repose dans son ensemble et malgré les variétés régionales sur le principe d’équilibre entre les aliments Yin, féminins, légumes, fruits, souvent mous et aqueux et les aliments Yàng, principe masculin comme les viandes, les fritures, les épices et chaque repas doit équilibrer les deux principes.

Comme les français, les chinois aiment visiblement manger. Pour souhaiter bon appétit, l’on dit « màn-man tcheu », « doucement, doucement mangez ! », même si certains parviennent à avaler à la baguette un plein bol de riz en quelques instants. Pour se saluer, on dit aussi « Ni tcheu fan le ma ? »« As-tu mangé ? ». Les Chinois, au moins ceux que nous croisons, semblent manger souvent au restaurant. Au Tibet, on mange souvent sur des sortes de coffres. Ici au Yunnan, sur des tables basses, assis sur de petits tabourets. On se croirait un peu à la dinette. Chacun commande un plat, les cuisiniers servent au fur et à mesure de leur préparation et tout se partage. Quand on mange à plus de 4 ou 5, la table est ronde autour d’un plateau tournant pour que chacun puisse goûter à chaque plat. En apéro, on vous sert souvent de l’eau chaude, parfois avec quelques herbes et au Yunnan, enfin du thé, des graines de tournesol, du radis noir au vinaigre pimenté. Il n’y a en revanche jamais de dessert. Gâteaux, fruits et sucreries se prennent en dehors des repas, pour une petite pause, ce qui nous va plutôt bien sur le vélo avec une digestion plus facile en début d’après-midi ! Mais autant nous nous régalons de fruits, autant nous ne pouvons que constater que la pâtisserie n’est pas le fort des Chinois.

Chacun pioche

Dans la grande assiette, des morceaux d’âne.

Les usages de bonne tenue au resto sont, disons, assez différents des nôtres… Tout se jette par terre, les os de poulet, les coquilles d’oeuf, les arêtes de poisson, les coques de graines de tournesol, les mouchoirs, les verres en papier… On crache avec un sonore raclement de gorge, on aspire les pâtes avec de grands sifflements sans que cela ne dérange le moins du monde. Autant dire qu’après le repas, c’est un vrai chantier ! Comme les cuisiniers sont d’abord aux cuisines, ou sur leur téléphone portable, le nettoyage peut attendre. Aussi le spectacle peut être surprenant en entrant, genre écuries d’Augias avant le passage d’Hercule… Certains font quand même des efforts, passent un coup de balai et de serpillière.

Ne pas être trop regardant sur la propreté des lieux !

Adaptation aux pratiques locales ! Non, nous ne crachons pas encore par terre.

Nous aimons aussi manger sur le pouce sur les marchés. Les allées et les rues sont pleines de petits étals tous aussi appétissants les uns que les autres avec des petites grillades de viande ou de légumes, des pommes de terre sautées aux épices, du tofu revenu à la poêle, de délicieux petits chaussons aux herbes, des crêpes fourrées. On peut montrer les ingrédients que l’on souhaite et en un petit tour de wok nous nous retrouvons avec une belle assiette. Sont également à l’honneur les oreilles de cochon, pattes de poules ou de canards, bec de canard, groin de cochon, le tout frit mais qui ne nous a pas tenté.

Encore une petite patte de poulet ?

Cuisine de rue

Le plus compliqué en Chine, plus que de trouver sa route, de prolonger un visa, de sortir d’une zone interdite ou de trouver à camper, c’est surtout de commander au restaurant. La liste longue comme le bras d’idéogrammes nous plonge dans un abîme de perplexité. Nous avons tenté plusieurs techniques :

  1. La technique « pic et pic et collégramme ». Choisir au petit bonheur les plus beaux idéogrammes. Ca a l’avantage d’être simple, d’amener de la variété mais c’est l’aventure. On peut se retrouver avec des yeux de mouton, du pénis d’âne, de la panse de brebis, de la langue de canard. C’est certainement la technique que choisirait mon frère Christian l’aventurier des cuisines du monde mais on a surtout statistiquement toutes les chances de se retrouver avec un plat épicé à vous donner le feu pour la journée. On apprend très vite « tching wenn, bù tài la » « s’il vous plait pas trop épicé » !

  2. La technique « Je regarde les assiettes des autres, je devine au jugé si l’autre en question trouve ça bon et je montre du doigt ». Ca oblige à trouver les restos où il y a suffisamment de monde mais malgré tout, nos goûts culinaires ne sont pas forcément les mêmes.

  3. La technique « Je regarde les photos ». Celle là marche bien dans les restaurants ayant eu la bonne idée d’afficher les photos au mur, c’est rarement le cas dans le Yunnan. Bon et c’est du style « présentation suggérée » car le résultat n’est pas indubitablement au rendez-vous.

  4. La technique « Je mémorise quelques plats ou quelques idéogrammes de base ». Ca marche aussi pas mal après quelques mois et l’on connaît quelques recettes simples mais ça ne favorise pas diversité et découverte…

  5. La technique « Je vais direct à la cuisine et je montre les aliments que je veux manger ». Ca marche bien au Yunnan où les restaurants ont souvent un présentoir réfrigérant permettant de montrer ce que l’on veut. Après, c’est le talent du chef de composer en respectant les principes de base d’équilibre du Yin et du Yang de la cuisine chinoise.

Nos plats préférés ? Il y en a tant… Leurs sautés d’aubergines au sésame ne nous ont jamais déçus. Le sauté de poulet, concombre, poivron et cacahuètes bien relevé au poivre du Sichuan, spécialité de Chengdu est un régal. Un autre très simple, omelette sautée aux tomates avec quelques oignons frais bien croquants. Les crêpes fourrées aux herbes tout juste chaudes. Les « momos » (gros raviolis) fourrés à la viande de yak ou au pommes de terre sur le plateau tibétain, avec une petite sauce relevée ; certains sont préparés avec une pâte fine, d’autres avec une pâte à pain au levain et avec une sauce au piment bien relevée, qu’importe le flacon, c’est un délice… Nous avons aussi quelques souvenirs de truites grillées sur la braise et de poêlées de champignons mémorables.

Truite grillée. Pas si simple à manger avec des baguettes.

Raviolis à la vapeur.

Un bémol cependant, lors des longues traversées de désert sans l’ombre d’un restaurant, la solution de base, pas trop lourde, simple, rapide pour passer ces moments : les nouilles chinoises. Au début, on adore, c’est bon, ça change, c’est vite fait quand il y a des moustiques. Au bout de quelques semaines, on ne peut plus les avaler. Rien que l’odeur des graisses et des glutamates nous donne la nausée ! De façon générale, autant leur cuisine fraîche est délicieuse, autant leurs produits de l’agro-alimentaire ne nous ont pas séduits et n’inspire pas aux Chinois eux-mêmes une grande confiance. Autre bémol, mais ça c’est le voyage, le bon pain du Bourget, les odeurs de chez Vincent le matin en passant sur l’avenue verte et les bons fromages de Savoie nous manquent ! Nous avons quand même trouvé du jambon de pays et des saucisses tout à fait honorables sur les marchés du Yunnan où le porc est à l’honneur. Et puis nous manque aussi le chocolat mais ça c’est une autre histoire…

Bon avec tout ça nous avons pu reprendre une partie des kilos perdus en Asie-Centrale !

Gageons que la cuisine du Laos nous soit aussi profitable !

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