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Retour en Chine, au pays des urbanistes accrocs à SimCity

Nous voici de retour en Chine pour quelques jours, le temps de remonter quelques degrés de latitude jusqu’à Shanghaï, de perdre quelques degrés de température et de prendre le bateau vers le Japon.

La frontière se devine déjà de loin par les plantations de grues et d’immeubles que nous apercevons. Fanchenggang, quelques tours de roues plus loin semble, sur notre carte routière qui doit dater de moins de dix ans, une paisible bourgade de pêcheurs en bord de mer. Elle compte aujourd’hui près d’un million d’habitants et il nous faut bien 30 km pour la traverser au milieu d’une forêt d’immeubles de plus de 30 étages et de 100 mètres de haut. On dirait une ville née de l’esprit fou d’un urbaniste-architecte opiomane, accroc à SimCity - vous savez, ce jeu vidéo où vous êtes maire et devez construire une agglomération contre vents et marées… et qui aurait un peu forcé sur la dose. Partout les mêmes tours, les mêmes avenues à 2 fois 4 voies, des bretelles démesurées, mais quand même deux pistes cyclables de plus de 5 mètres de large de chaque côté. Prévoyants ces urbanistes, avec leur petit vélo dans la tête. Des publicités gigantesques chantent déjà le paradis à venir... C’est encore un peu difficile à imaginer de loin comme de près. Ceinturés par ces champs d’un nouveau genre, quelques morceaux de « vraie » ville, vivante et bordélique à souhait comme on les aime, résistent encore et toujours à l’envahisseur. Ils sont fous ces Chinois !

Fanchenggang, paisible bourgade de pêcheur sur notre carte est devenue en quelques années une ville bientôt millionnaire

Une ville née de l’esprit fou d’un architecte-urbaniste opiomane accroc à SimCity

Des publicités gigantesques pour faire vendre la forêt de béton

l reste quand même quelques coins de vraie vie bordélique à souhait

En quittant la ville, nous montons dans des forêts d’eucalyptus plantés et récoltés comme un vulgaire maïs. Les troncs sont déroulés et séchés en plaques fines pour fabriquer sans doute du contreplaqué. Les restes ou les troncs inutilisables sont broyés en copeaux pour alimenter papeteries et chaufferies. Nous traversons cette campagne un peu morne par un ciel bas, le long d’une route fangeuse bordée d’une terre lourde. Nous plantons la tente un soir au bord d’une rivière et assistons au spectacle étonnant de villageois en scooter, enlevant leurs chaussures et remontant leur pantalon jusqu’aux cuisses pour traverser à gué au milieu du courant. Jamais l’écart de richesse entre villes et campagnes ne nous aura paru aussi élevé qu’ici. Des villages gris béton se succèdent avec des constructions plutôt déprimantes et les quelques taudis des oubliés du miracle chinois.

Jamais l’écart de richesse entre ville et campagne de nous aura paru aussi important. La publicité chante déjà le paradis urbain aux oubliés du miracle chinois.

Traversée à gué de la rivière pour les villageois

Déroulage et séchage du bois d’eucalyptus

Des villages gris béton. Ici, le coin des récupérateurs

Aviez-vous déjà entendu parlé de Nanning, la préfecture locale et de sa province le Guangxi ? Vous non plus ? C’est juste une ville de 9 millions d’habitants, Berlin, Madrid et Rome réunies, dans la province la plus méridionale de la Chine qui compte 46 millions d’habitants, quasiment la population de l’Espagne… Nous reprochons souvent aux Américains de ne pas connaître la géographie et de ne pouvoir qu’à peine situer la France sur une carte d’Europe. Que connaissons-nous de la Chine ? A notre décharge, elle ne comptait « que » 1 millions d’habitants en 1980, cela nous aurait-il échappé lors de nos cours de géo ? C’est encore un nouveau visage de la Chine, que nous n’avions fait qu’effleurer à Chengdu, et un petit avant goût de ce que va être Shanghaï, la plus grande ville de Chine !

Nous y retrouvons d’abord le bruit. Dès 7 heures du matin, les hauts-parleurs municipaux déversent des musiques martiales et officielles entrecoupées sans doute de bons conseils patriotiques. Au boulot les Chinois ! Quelques minutes plus tard, retentit la musique en guise de sonnerie du collège. Puis les sonos commerciales de toutes les boutiques du centre-ville commencent leur concurrence de décibels pour attirer le chaland. Les économistes avertis reprochaient à l’économie chinoise de ne vivre que sur les deux piliers de l’exportation et de l’investissement dans les travaux publics en délaissant le troisième pied du tabouret de la consommation intérieure… Qu’ils viennent faire un tour par ici pour apprécier le délire de boutiques flamboyantes qui rivalisent d’ingéniosité pour faire entrer ces nouveaux Chinois dans le moule de la consommation effrénée ! Des vendeuses qui entament des pas de danse au pied des magasins, des petites cornes rouges (c’est bientôt Noël qui ne signifie pourtant rien ici) sur la tête, qui brandissent des panneaux géants, qui tapent des mains, chantent. Il faut voir le briefing des vendeurs au garde à vous devant la chef et les deux sous-chefs de vente, écoutant avec discipline les recommandations avant d’attaquer la soirée.

Le briefing discipliné des vendeurs avant l’assaut du soir

Dans les parcs la nuit tombée, l’ambiance est plus bon enfant mais tout aussi bruyante. Comme au Vietnam, c’est l’heure venue du karaoke, pire que les sept plaies d’Egypte réunies. Les apprentis chanteurs s’égosillent avec cœur et enthousiasme devant un écran, ampli à fond, au son du clavier de piano électronique d’un petit vieux à la casquette mao, concentrés et insensibles à la concurrence sonore des voisins. Des petites vieilles se font quelques sous en vendant les paroles des chansons les plus populaires. Des plus jeunes tapinent tranquillement et chantent une toute autre musique. Le spectacle est cocasse mais c’était quand même plus gracieux sur le plateau tibétain. En journée, les parcs –les Chinois partagent avec les Iraniens le génie du jardin- sont nettement plus mélodieux. Des groupes d’anciens jouent flûte, cithare, luth et percussions, des chorales chantent au soleil sous les arbres. Des calligraphes peignent sur le sol avec de l’eau de magnifiques idéogrammes éphémères qui disparaîtront comme la rosée aux premiers rayons du soleil. Quelques femmes prennent des cours de danse en plein air. Un ancien en survêtement bleu ciel passe à vélo avec son sabre le long du cadre, revenant d’une séance d’arts martiaux.

Les apprentis chanteurs de karaoke s’égosillent avec cœur et enthousiasme

Le jour, les parcs sont beaucoup plus mélodieux et les musiciens viennent jouer sous les arbres

Calligraphies éphémères sur le sol, c’est magnifique

Nous y retrouvons aussi la circulation dense de Chengdu avec comme à Hanoï, une très forte proportion de deux roues motorisés électriques qui eux, ne font pas de bruit et roulent paisiblement, pas plus bruyants qu’une eau tranquille en nous entraînant dans leur courant. Nos urbanistes ne devaient cependant pas avoir de transports en commun dans leur logiciel. Il y a bien quelques bus mais ni tramway ni métro (2 lignes sont en construction) dans une ville qui dépassera bientôt 10 millions d’âmes !

Nous retrouvons la circulation dense d’Hanoi avec une large majorité de scooters, électriques ici, c’est plus calme…

Service de nettoyage avec le chapeau chinois de sécurité règlementaire !

Au détour d’une rue, nous apercevons toute une colonne de personnes transportant légumes, fruits, poissons, viande. Nous la suivons et par un petit trou de souris de moins de 2 mètres de large, débouchons sur un autre monde, un autre univers du jeu, avec de fines radicules de venelles, un marché grouillant avec de vraies carottes, des légumes de toutes sortes, des marchandes au poignet ferme qui coupent le poisson à coup de hachoir, ouvrent les canards, crient, plaisantent. Pas l’ombre d’un touriste ici, on nous dévisage et nous interpelle en riant, une vendeuse glisse dans notre sac une deuxième ration de boules de sésame, des camelots vendent leurs herbes magiques. Un bel espace de vie hors jeu, oublié des planificateurs de la modernité, inaccessible à leurs algorithmes, mais jusqu’à quand ?

Derrière un petit trou de souris, un autre espace du jeu, oublié des planificateurs, grouillant de vie et d’odeurs

Nous retrouvons enfin aussi à Nanning l’odeur caractéristique et entêtante jusqu’à la nausée de la soupe chinoise à laquelle se mêlent les senteurs fortes des crevettes séchées qui submergent le supermarché. Des odeurs que nous pourrions à présent reconnaître entre toutes !

C’est par le train que nous partons pour Shanghaï, avec un petit goût de retour. Nous voyons partir nos fidèles vélos par le service fret non sans quelques appréhensions mais les chemins de fer chinois sont paraît-il bien organisés. Verdict dans quelques jours…

Petit nettoyage au karsher de nos vélos après les boues du Guangxi et avant leur montée dans le train.

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